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Thomas prit l'ascenseur pour atteindre le onzième et avant-dernier
étage, où se situait le bureau de Victor. Dans quelques mois, lorsque
la mission sur Mars serait terminée, c'est au douzième et dernier étage
qu'il devrait se rendre pour le rencontrer ; car après une réussite
aussi éclatante, Victor obtiendrait le poste suprême et deviendrait le
directeur tout-puissant de la NASO. Quant à Thomas, il espérait
récupérer la place de sous-directeur devenu inoccupée ; mais pour cela,
il lui fallait éviter toute maladresse et conserver la confiance du
futur nouveau directeur.
Après avoir tapé trois petits coups à la porte
pour s'annoncer, Thomas pénétra dans la pièce. Victor était
confortablement installé dans un large fauteuil en cuir, derrière un
bureau de style Régence et il s'acharnait, avec deux doigts, sur le
clavier de son ordinateur.
– Asseyez-vous, Thomas.
Thomas prit place sur une modeste chaise
recouverte d'un tissu un peu usé et il remarqua les journaux du matin,
mal repliés, que son supérieur venait, manifestement, de lire. C'est
d'ailleurs de cela que Victor voulait l'entretenir.
– Thomas, dites-moi où en est la préparation de nos astronautes ?
– Tout se déroule normalement, répondit Thomas un peu surpris par la
question.
Après tout, cela faisait vingt ans maintenant
qu'il s'occupait des astronautes de la NASO et cela sans qu'il y ait
jamais eu le moindre problème. Thomas se demanda quelle mouche avait
donc piqué Victor par ce beau matin de septembre ?
Comme s'il avait lu dans ses pensées, Victor lui
donna la réponse sans attendre :
– Nous devons avancer la date de leur départ.
– Comment ! Mais pour quel motif ?
Victor prit la pile de journaux froissés et la
poussa vers Thomas :
– La Belgique vient d'annoncer "officiellement" qu'elle allait lancer
un
programme de développement concernant la planète Mars.
Thomas songea que Victor avait l'air sérieux et
puis le premier avril était encore loin. Mais tout de même, la Belgique
et
la planète Mars !!
– Voyons, mais comment ce petit pays pourrait-il...
Victor l'interrompit d'un geste agacé, il
détestait les gens lents à réagir :
– J'ai un informateur dans leur équipe - c'est l'un de mes anciens
élèves. Il m'a appris qu'un grand pays s'apprêtait à leur fournir toute
l'assistance nécessaire. Nous n'avons pas de temps à perdre si nous ne
voulons pas les laisser réduire nos projets à néant.
Thomas comprenait l'inquiétude de
Victor. Depuis que l'homme pouvait explorer les galaxies les plus
lointaines grâce à l'utilisation de droïdes, plus personne ne
s'intéressait à nos bonnes vieilles planètes. Même la Lune ne
faisait plus rêver !
C'est pourquoi Victor avait élaboré un plan afin
de recréer sur Mars des conditions de vie identiques à
celles de la Terre. Ainsi des familles entières s'en iraient coloniser
cette planète et la Naso pourrait revendiquer la propriété de la
planète rouge au détriment
des autres puissances spatiales. Mais en attendant, il fallait
garder le secret le plus absolu.
Sous le faux prétexte d'envoyer des sondes à la
rencontre d'une comète, la NASO avait procédé au lancement d'une
multitude de lanceurs qui, une fois parvenus dans la proche banlieue de
Mars, avaient déployé de vastes miroirs. Ceux-ci, en concentrant la
lumière solaire sur les pôles martiens, avaient pour but de faire
fondre la glace accumulée ; car pour que la vie devienne possible, il
fallait de l'eau en grande quantité.
La seconde partie de l'opération consistait à
envoyer des astronautes avec un chargement d'espèces végétales de
toutes sortes qui, une fois plantées, feraient de Mars une planète
respirable et vivable.
Et voilà qu'un petit pays risquait de tout
bouleverser ! C'était inadmissible.
– A quelle date voulez-vous avancer ce départ ? demanda Thomas.
– Le plus tôt sera le mieux, répondit Victor. De toute façon, cela ne
devrait
pas poser problème puisque l'entraînement de nos astronautes est
pratiquement terminé. On m'a dit qu'ils s'entendaient bien, tous les
deux. C'est vrai ?
– Euh... oui, c'est exact.
Thomas devait reconnaître que le comité qui
avait sélectionné les deux hommes avait fait le bon choix. D'abord, il
y avait Andy, un technicien, hors pair, réputé pour son sang-froid
et sa patience, des qualités qui se révélaient indispensables pour
cohabiter avec le second astronaute. Le dénommé Max était un expert
du
jardinage, un Mozart de la plante verte, mais il
était également doté d'un humour parfois difficilement
supportable.
Le voyage vers Mars durerait plusieurs semaines,
il fallait donc impérativement que les deux hommes puissent vivre
ensemble en parfaite harmonie. Malgré leurs différences, l'entente
entre les deux hommes avait été immédiate.
Thomas quitta le bureau de Victor afin d'aller
informer les astronautes sans attendre. Lui qui avait horreur des
imprévus, il aurait préféré que les deux
hommes puissent prendre du repos avant le grand jour. Il monta à
bord d'une jeep de service et prit la direction du centre
d'entraînement.
– Tu as serré l'écrou à fond ? Tu es certain ? Tu ne fais pas d'erreur ?
– Mais oui Max, puisque je te dis que c'est fait !
– Alors on a terminé l'exercice. Viens Andy, on quitte cette fichue
piscine. Je sens les branchies qui me poussent à la place des poumons.
Les deux astronautes firent signe aux huit
plongeurs qui les entouraient et qui les aidèrent à sortir de la
piscine. Aujourd'hui, les deux hommes avaient appris à réparer l'un des
quatre mini-robots qui seraient utilisés pour "réparer !" s'il y avait
une panne. C'était bien la peine d'avoir des machines !
Max et Andy apprécièrent d'être libérés de leur
encombrante combinaison ; ils étaient fatigués, le visage ruisselant de
sueur, les cheveux collés sur leur crâne.
– Je déteste ça, ronchonna Andy tandis qu'ils se dirigeaient vers les
douches. Je sais bien qu'on doit être prêt à
faire face à toutes les situations quand on sera sur Mars, mais ce
maudit bassin, je m'y sens tellement à l'étroit.
Max eut un sourire moqueur :
– Tu es claustro ? Sacré Andy ! J'espère que tu
n'as pas peur des araignées ? Il y en a plein sur Mars, depuis
le temps qu'on n'a pas fait le ménage là-haut, tu imagines !
Andy prit un air navré :
– Ta blague est lamentable, Max. Elle ne fera rire personne, pas même
un martien.
Max eut l'air surpris :
– Ça y est, tu te mets à l'humour ! Tu as raison, c'est bon pour la
santé. Mais tu as une petite mine ce matin, qu'est-ce qui
t'arrive ?
– Après toutes ces semaines de travail intensif, ça n'a rien de
surprenant. Ça passera.
Andy fit un clin d'oeil à son partenaire avant
d'ajouter :
– Et puis l'air martien me fera du bien.
Les deux hommes allèrent prendre leur douche et
enfiler des vêtements propres. Ils s'apprêtaient à quitter le hangar
quand Max aperçut une jeep en train de se garer sur le parking.
Il mit, sans ménagement, un coup de coude dans
les côtes d'Andy.
– Regarde qui vient nous rendre une petite visite, vieux ! Saint
Thomas en personne ! (Max porta la main en visière au-dessus de ses
yeux) Mais je
ne vois pas Dieu le père à ses côtés ?
Andy leva les yeux au ciel. Il détestait que Max
le traite de "vieux". Et puis d'où pouvait venir ce drôle de surnom
dont il avait affublé Thomas ?
Max lui répondit que la réponse était évidente :
– Il veut créer un autre paradis, qu'il peuplera de
centaines de terriens qui arriveront à bord d'énormes fusées. Ce seront
les
petites créatures de Thomas, comme celles qu'on trouve dans la Bible !
Andy soupira et jeta un regard en coin à son
ami. Est-ce que
Max avait passé les tests psychologiques ? Il eut un doute et songea
qu'il faudrait qu'il aille vérifier auprès du service Santé de la NASO
– Tu exagères, Max, protesta-t-il. Moi, j'ai beaucoup de respect pour
Thomas. Il veut réintroduire la vie sur une planète
morte,
c'est tout simplement incroyable !
Max dévisagea son collègue et acquiesça :
– Oui, tu as raison, vieux. Thomas est " méga intelligent " et
nous ne sommes que deux imbéciles.
– Pourquoi tu dis ça ? bredouilla Andy déconcerté.
– Parce que tu penses vraiment que deux types sensés accepteraient de
risquer leur vie pour aller se morfondre deux ans sur un tas de
poussière cosmique ?
Andy ne répondit pas. Pour la première fois, Max
venait de tenir
des propos pertinents.
Thomas avait aperçu les deux astronautes ; il
s'avança vers eux et leur résuma la conversation qu'il venait d'avoir
avec Victor.
– Nous sommes obligés d'avancer le départ, dit-il en oubliant de
préciser que c'était un ordre de son supérieur. Donc, le décollage
s'effectuera dans une semaine.
– Mais c'est impossible ! protesta Andy. Il reste encore beaucoup de
choses
à préparer, nous allons manquer de temps.
– Nous prendrons du personnel supplémentaire pour vous aider, répondit
Thomas. Une
semaine, ce sera suffisant, j'en suis certain.
– En tout cas, ce sera " suffisant " pour informer les médias, laissa
tomber Max avec un sourire narquois à l'encontre de Thomas.
Celui-ci ne releva pas et repartit en prétextant un rendez-vous urgent.
A peine dans sa voiture, il redémarra sur les
chapeaux de roue, en faisant crisser les pneus sur l'asphalte.
– Regarde Saint Thomas qui se carapate, ricana Max avant de voir le
visage consterné de son partenaire. Hé, Andy, ne t'inquiètes pas, vieux
! Tout ira bien.
Mais, malgré les propos rassurants de son
co-équipier, Andy déclara vouloir rencontrer Victor dans les plus brefs
délais et rien ne put le faire changer d'avis.
Max le regarda s'éloigner et, pour se changer
les
idées, il partit bavarder avec Doby, un employé de la maintenance
avec qui il s'entendait bien. Il avait une petite
affaire à lui proposer en échange d'un joli paquet de billets - ce qui
arrangerait Doby qui avait perdu un peu trop argent au poker la
semaine précédente.
Max se frotta les mains de plaisir et il partit
à la
rencontre de Doby tout en chantonnant sa chanson préférée.
Le vaisseau Bételgeuse, rebaptisé "Bidule" par
Max, attendait sagement sur son pas de tir sous l'oeil indifférent de
quelques journalistes qui ne lui consacreraient que quatre lignes dans
leurs colonnes. Ils avaient même failli ne pas venir mais l'actualité
était si morose qu'il fallait bien trouver de quoi remplir les
journaux. Surtout quand la rubrique des chiens écrasés et celle des
objets
perdus-trouvés n'arrivent plus à combler les pages. Et tout cela pour
un vaisseau qui - c'était la version officielle - emporterait des
astronautes à la rencontre d'une planète dénuée de tout intérêt !
Tandis que les journalistes avalaient des petits
fours en attendant le décollage, les astronautes se
trouvaient dans leur vestiaire, occupés à revêtir leur combinaison de
vol.
Andy avait déjà terminé et il s'était isolé pour
tenter de se détendre. Debout, adossé à un mur, il voyait trembler ses
mains et la transpiration commençait à lui couler
dans le dos. Décidément, le stress était pire que tout ce qu'il avait
imaginé !
Pendant ce temps, Max s'habillait tout en
discutant avec Doby et Thomas. L'équipe avait réalisé un gros
travail
pour que tout soit prêt en temps et en heure et c'était une belle
réussite.
– J'espère que vous n'oublierez pas de leur payer les heures
supplémentaires ? s'inquiéta Max en souriant.
– C'est déjà fait, répondit Thomas, vexé. C'était
tout à fait normal et ...
Un bruit sourd vint interrompre sa phrase.
Surpris, les trois hommes se retournèrent et
découvrirent Andy, allongé de tout son long sur le sol. Ils se
précipitèrent mais, malgré leurs efforts pour le réanimer, l'astronaute
demeura inconscient.
Vingt minutes plus tard, une ambulance emportait
Andy vers l'hôpital tandis que Victor, alerté, entrait au pas de course
dans le vestiaire.
– Que s'est-il passé, aboya-t-il sans ménagement. Mais enfin, dites
quelque chose ?
Thomas eut un geste d'impuissance :
– On l'a entendu tomber par terre et, ensuite plus rien, pas un mot. On
ne sait pas ce qui a pu se
produire.
– Il n'avait pas l'air en forme ces jours-ci, dit Max, mais je ne
pensais pas qu'il était si fatigué. C'est inquiétant.
A cet instant, Max réalisa que Victor
le regardait d'une manière étrange. Il ne put s'empêcher de songer
au
gros chat qui regarde une toute petite souris, et se sentit mal à
l'aise.
– Pourquoi vous me regardez de cette façon ? commença-t-il.
– Parce que ce vaisseau décollera dans deux heures, s'écria Victor. Et
VOUS
serez à son bord !
Thomas crut avoir mal entendu.
– Voyons, vous n'êtes pas sérieux ? Il faudrait être un surhomme pour
supporter deux années de solitude forcée !
Mais Victor n'était pas homme à renoncer :
– Je n'ai pas investi quatre-vingts milliards dans ce projet pour le
voir capoter parce que l'un de mes astronautes a fait un malaise.
Perdant son calme, Thomas répondit sèchement:
– Vous oubliez que c'est l'argent de la NASO et non le
vôtre !
– Max a été entraîné à faire face à toutes les situations, y compris
celle-ci, rétorqua Victor. Andy aurait pu faire une chute fatale dans
un cratère martien et Max aurez dû se débrouiller seul. Alors je
ne vois pas où est le problème ?
– Ils devaient être "deux" au départ, insista Thomas. Cette solitude
que vous imposez à Max sera vite insupportable !
Victor se tourna vers Max et lui expliqua :
– Dans six mois, un autre vaisseau décollera pour vous apporter
du matériel et de l'équipement. Je m'arrangerai pour que Andy, ou tout
autre astronaute, soit à son bord, vous avez ma parole.
Doby et Thomas posèrent sur Max un regard
interrogateur. Il ne devait pas accepter !
– Je suis d'accord, répondit Max après quelques secondes de réflexion.
Quelques mois de solitude ne me font pas peur.
Victor parut satisfait.
– Alors, allons-y ! Ne perdons pas davantage de temps.
Pendant que Doby accompagnait l'astronaute
jusqu'à l'ascenseur qui lui permettrait d'accéder au vaisseau, Thomas
entraîna Victor à l'écart :
– Attendez au moins d'avoir des nouvelles de l'hôpital ! Si Andy a été
victime d'un simple malaise, il sera sur pieds d'ici quelques heures et
il pourra embarquer. Il suffit de dire à la presse qu'il y a un petit
problème technique pour expliquer le retard.
Victor sembla ne pas avoir entendu et répondit :
– Le départ aura lieu comme prévu dans deux heures, Thomas.
Max prit place à bord du vaisseau et commença
à s'installer. Victor,
Thomas et Doby rejoignirent le centre de contrôle afin de suivre le
compte à rebours.
Trente minutes avant le départ, le téléphone
sonna et Victor échangea quelques mots avec son interlocuteur avant de
raccrocher.
– Andy va pouvoir partir ? demanda Thomas.
– Décidément, vous êtes un optimiste né ! lui répondit Victor. Il a la
rougeole et plus de quarante de fièvre. Je vous laisse annoncer la
nouvelle à Max et lui souhaiter "bonne route de ma part !"
Max venait de se livrer à quelques contrôles de dernière minute
quand Thomas le contacta pour lui répéter les propos de Victor. Max eut
une pensée pour son co-équipier. C'est vrai que Andy manquait d'humour
mais il avait bon caractère, il était même facile à vivre et puis se
retrouver seul, durant de longues semaines, n'avait rien de
réjouissant.
"Tant pis ! songea Max. Je suis sûr que
j'arriverai à m'occuper quand je serai sur la planète rouge. De toute
façon, il est trop tard pour reculer."
Il se cala dans son siège, vérifia la fermeture
de son harnais et attendit.
Entourés de techniciens penchés sur leurs ordinateurs, Thomas et
Victor avaient les yeux rivés
sur le compte à rebours :
"... Cinq, quatre, trois, deux, un... Mise à feu !"
Bételgeuse décolla dans un immense nuage blanc
et fonça dans le ciel ; bientôt, elle ne fut plus qu'un point
minuscule, avant de disparaître totalement.
Thomas poussa un soupir.
– Qu'est-ce qui vous arrive encore ? s'inquiéta Victor.
– Oh rien, répondit Thomas. Je me disais que c'était une bonne idée de
placer un astronaute dans la prochaine fusée. Ça va aider Max à tenir
le coup, je veux dire moralement. Mais nous allons devoir procéder à un
certain nombre de modifications car cet engin n'est pas conçu pour un
vol habité. Il faut ajouter une couchette, une douche, des...
– Holà, Thomas, vous rêvez mon ami ! Je vous rappelle que notre budget
ne doit pas être dépassé.
Thomas ouvrit de grands yeux ronds :
– Mais l'astronaute qui doit rejoindre Max...
– Vous êtes naïf, c'est incroyable ! s'exclama Victor.
Thomas ne pouvait en croire ses oreilles. Il
rappela à Victor qu'il avait donné sa parole et puis Max ne tiendrait
pas indéfiniment seul sur cette planète déserte.
– Dès qu'il sera arrivé là-bas, il se mettra à planter tous les arbres
et les plantes qui sont à bord de Bételgeuse, expliqua Victor. Il
travaillera d'arrache-pieds pour combler sa
solitude et, ainsi, il fera un excellent travail.
– Mais ensuite, que deviendra-t-il ? s'inquiéta Thomas.
Victor eut un geste qui signifiait que cela
n'avait aucune importance.
– Quand les premières familles atterriront sur Mars dans deux ans,
poursuivit-il, elles découvriront un véritable petit paradis et c'est à
moi qu'on devra la réalisation de cette pure merveille. A moi, vous
entendez, Thomas ? J'aurai la reconnaissance de la patrie, on me
couvrira de médailles et je serai reçu par les chefs d'état du monde
entier. La gloire, Thomas ! Elle rejaillira sur vous, ne l'oubliez pas
!
– Euh, mais je..., fit Thomas médusé.
– Et vous aurez la fortune en plus, mon ami ! A moins que l'argent ne
vous intéresse pas
?
C'est à cet instant précis que Thomas se
désintéressa totalement du sort de Max !
Bételgeuse était partie depuis plusieurs semaines et la mission se
déroulait sans anicroche.
Max entrait en contact plusieurs fois par jour
avec les contrôleurs de la NASO afin de leur faire un bref rapport sur
le bon comportement du vaisseau. Le reste du temps, il s'occupait comme
il le voulait. Pour cela, il avait emporté de quoi remplir agréablement
ses journées : des livres, des disques - Max adorait chanter ! - des
mots-croisés. Il y avait aussi un jeu d'échecs mais, hélas, sans Andy
il ne sortirait pas de la boîte. Et puis Max avait pensé à varier son
alimentation, histoire de se donner des sensations agréables. Mais là,
c'était une tout autre histoire !
Thomas venait d'arriver dans la salle de contrôle ; il y avait peu
de personnel, c'était une journée tranquille. Il salua amicalement les
techniciens puis récupéra le dernier rapport concernant Bételgeuse. Une
tasse de café à la main, il commença à le lire.
– Qu'est-ce que ce...
Thomas reposa brutalement sa tasse et fonça vers
Doby.
– C'est quoi, ça ? gronda-t-il en agitant les feuillets sous le
nez du technicien.
– Euh... Max a l'air d'être en super forme, dit Dobs avec un rire
jaune.
– C'est le moins qu'on puisse dire, répondit sèchement Thomas. Donc je
lis : J'ai bu quelques godets dans un troquet spatial sympa, et je suis
tombé sur une Vénusienne superbe. Je l'aurai bien embarquée à mon bord,
mais elle était déjà prise ailleurs. Doby, regardez-moi !
Mal à l'aise, le technicien cherchait à esquiver
le regard pénétrant de son supérieur.
– Vous allez me dire la vérité où je vous emmène chez Victor !
Doby prit l'air de quelqu'un que l'on soumet au
supplice.
– Il a "peut-être" caché deux ou trois bouteilles de whisky parmi les
provisions. Histoire de se changer les idées.
Thomas attrapa le technicien
par les revers de sa blouse blanche et l'attira jusqu'à ce que son
visage soit à toucher le sien.
– Combien ? Je veux le chiffre exact.
Doby déglutit avec difficulté et avoua :
– Quatre caisses de douze bouteilles.
Soufflé par la réponse, Thomas lâcha Doby qui
retomba dans son fauteuil.
– Je ne savais pas que c'était pour emmener là-haut, se lamenta le
technicien.
Je croyais qu'il voulait faire une petite fête privée avant son départ,
je vous assure.
Mais Thomas pensait à tout autre chose à cet
instant.
"On a envoyé dans l'espace un astronaute alcoolique, tandis que
l'autre
est à l'hôpital avec la rougeole. Cette mission est maudite !"
Une lueur lui traversa l'esprit.
"C'est Victor le seul responsable, il n'a pas
voulu m'écouter quand je l'ai conjuré de tout annuler. Le voilà qui
s'imagine que
ce cinglé de Max va transformer la planète rouge en paradis.
Quatre-vingt milliards jetés à la poubelle ! Si les dirigeants de notre
pays apprennent cela, nous sommes morts, tous les deux."
Thomas se tourna vers Doby, le visage menaçant.
– Ecoutez-bien ce que je vais vous dire, Doby ! Personne ne doit
savoir, vous
m'avez entendu ? Personne. S'il y a un autre problème, vous me prévenez
aussitôt ! Moi, et personne d'autre !
– Je vous le jure, monsieur Thomas. Vous serez informé dans la seconde.
– Ça vaudrait mieux pour vous, Doby.
Et Thomas fit disparaître le rapport sous une
impressionnante pile de dossiers.
Le vaisseau se posa sur Mars et Max, ravi de
retrouver les grands espaces, descendit faire quelques pas sur la
planète rouge. Hélas ! Si les premières photos ramenées par des sondes
comme Viking Orbiter ou Pathfinder montraient une vaste étendue
déserte, l'homme, au fil des années et au gré de dizaines de missions,
avait oublié sur Mars une multitude de déchets ; il y avait des sondes,
des caméras, des robots et même des véhicules tout-terrain.
Max fit la grimace. Heureusement, une visite
plus approfondie lui remonta le moral : la glace des pôles s'était mise
à fondre et des petites rivières sillonnaient la terre rouge.
Victor avait vu juste : Max avait mal supporté
ses trois mois de voyage solitaire alors, sans attendre, il retroussa
ses
manches et commença ses
plantations.
Quelques semaines plus tard, toutes les plantes,
tous les arbres étaient mis en terre et commençaient à s'épanouir, à se
couvrir de feuillage vert. Même le sol rouge disparaissait sous une
couverture
de verdure.
Max décida de fêter ce grand
événement et il prit tout son temps pour le faire du mieux possible.
Il se prépara un superbe déjeuner avec boeuf
bourguignon, camembert, tarte tatin (les cuisiniers de la NASO avaient
bien fait les choses) tout en chantant à tue-tête ; il s'en donnait à
coeur joie puisqu'il n'y avait personne pour lui rappeler qu'il
chantait faux.
"Pauléééétte, Paulééétte, tu es la reine des
paupiettes. Olé !"
Max avait rapidement installé sa table pliante
au pied du vaisseau et mis son couvert. Il était en train de savourer
la première bouchée quand une goutte d'eau s'écrasa dans son assiette,
puis une autre. Max réalisa que c'était la toute première pluie qui
s'abattait sur Mars, mais elle aurait pu attendre qu'il ait fini son
repas.
Il se levait pour aller se mettre à l'abri quand
un son inhabituel attira son attention.
– Krong, kim, bondong !
Max se retourna et découvrit trois petits
bonshommes à quelques pas de lui. Il resta pétrifié. Non, c'était
sûrement une hallucination ? Max regarda son
assiette : il y avait quelque chose dans la sauce qui ne passait
pas ?
La pluie tombait régulièrement maintenant ; une
pluie légère, presque tiède qui semblait vraiment intriguer les êtres.
– Des martiens ! s'exclama soudain Max comme si les mots réussissaient
enfin à sortir de sa bouche. C'est vrai ? Vous êtes des habitants de
Mars ?
Les êtres se concertèrent et celui du milieu qui
paraissait être le chef parla à son tour :
– Komiki, nous sommes bien des martiens. Et vous êtes ?
– Je suis un terrien, je m'appelle Max.
Les êtres discutèrent à nouveau et le chef
reprit :
– Pondong mon nom est Loppi, Pong voici Chonp et Staf.
Max s'avança et leur mit à chacun une tape
amicale sur l'épaule :
– Salut les gars ! J'espère qu'on va devenir copains ?
Pour toute réponse, les martiens lui firent un
large sourire. Et comme la pluie se transformait en une véritable
averse, Max invita ses nouveaux amis à bord du vaisseau.
Quelques jours avaient suffi à Victor pour rencontrer les hauts
dirigeants et
obtenir davantage d'argent pour la poursuite de la mission martienne.
Victor s'était frotté les mains et était reparti
avec la promesse de quelques milliards supplémentaires en échange d'une
émission de télévision, diffusée en direct, avec Max en
présentateur-vedette.
A peine rentré, Victor convoqua Thomas dans son
bureau et le mit au courant.
– Vous arrangerez ça avec Max, je suis sûr qu'il sera ravi de passer
sur nos chaînes télévisées. A propos, vous ne m'avez pas donné de ses
nouvelles depuis plusieurs semaines. Tout va bien ?
Thomas ouvrit la bouche mais pas un son ne
sortit.
– Ne me dites pas qu'il y a un problème de diffusion ? s'étonna Victor.
Avec ce matériel perfectionné, ça ne tombe jamais en panne.
– Euh...je...mais... , bafouilla Thomas.
Victor réalisa que son adjoint
s'agitait sur sa chaise.
– Thomas, il y a un problème ?
Thomas craqua. Il sortit un CD de sa veste
et le tendit à Victor.
– On a reçu ça il y a une semaine mais je ne savais pas comment vous
l'annoncer.
Victor prit le CD et le glissa dans l'ordinateur.
– Vous devriez vous asseoir, Victor, lui conseilla Thomas. Vous n'allez
pas aimer, je vous
préviens.
Soudain, l'image de
Max apparut sur le large écran. Il portait une chemise à fleurs
rouges et jaunes largement entrouverte sur un jean délavé et il
commença à parler.
– Bonjour Victor ! Salut Thomas ! Vous deviez attendre de mes nouvelles
avec impatience et bien en ce qui concerne ma mission, elle se déroule
parfaitement, d'ailleurs je vais vous le prouver.
Max avait empoigné la caméra et il montrait, par
un large plan panoramique, le paysage qui l'entourait. Victor n'en crut
pas ses yeux. Le sol disparaissait sous une couche de gazon vert tendre
parsemé de boutons d'or et, à l'arrière plan, on apercevait une
multitude de jeunes arbres feuillus.
Victor ne put retenir une exclamation
enthousiaste. Ses prévisions les plus optimistes étaient largement
dépassées, la vie se répandait sur Mars comme un raz-de-marée.
La caméra fut reposée sur son pied et Max
réapparut à l'écran.
– C'est beau, n'est-ce pas, Victor ? C'est tellement beau que j'ai
décidé de m'installer ici. J'ai tout ce qu'il faut pour être le plus
heureux des hommes : de la nourriture à profusion à bord de la fusée et
bientôt il y aura des fruits frais sur les arbres. Et j'ai rencontré
des copains !
– ... copains, répéta Victor, sans comprendre.
– Alors voilà, je vous dis au revoir les gars et merci pour tout !
Et l'écran s'éteignit.
– ... c'est une plaisanterie, balbutia Victor.
Il se leva et apostropha sèchement Thomas.
– Mais enfin, dites quelque chose ?
Thomas évita le regard de Victor :
– Max a tout débranché, nous n'avons plus aucun contact avec lui depuis
" ÇA ".
– Il est devenu fou, ce n'est pas possible ! balbutia Victor.
Soudain, en quelques secondes, il réalisa ce que
la crise de folie de Max allait lui coûter : les crédits : refusés !
l'émission de télé : à oublier ! Et Victor : démissionné ! viré ! Ses
amis ? Il les entendait
rire aux éclats en le montrant du doigt.
Le déshonneur ? Il s'abattrait sur
lui dans tous les journaux en première page.
Victor porta la main à son coeur et il
s'écroula sur la moquette.
Aussitôt, Thomas se précipita vers lui et se mit
à
lui tapoter
les joues pour lui faire reprendre ses esprits. Lui aussi, était
profondément contrarié et, en même temps, il se demandait :
"Que peut-il se passer sur Mars en ce moment ?"
Thomas aurait donné cher pour le savoir.
Max avait dit la vérité : il menait une vie très agréable
sur la planète rouge et il s'était fait des amis, plein d'amis.
L'arrivée d'un
astronaute sur Mars avait d'abord intrigué les martiens, qui s'étaient
vite passionnés pour cet être qui transformait leur terre inculte en un
magnifique jardin verdoyant.
De plus Max possédait une autre qualité : il
chantait ! Horriblement faux d'après tous ceux
qui l'avaient côtoyé sur Terre mais les Martiens avaient un sens du
rythme très différent des Terriens. Max avait donc accepté, sans se
faire
prier, de donner, de temps en temps, un concert devant un public
déchaîné qui l'applaudissait à tout rompre et qui multipliait les
rappels. Et Max adorait cela !
Mais il fallait aussi remplir les journées
puisque les plantations étaient désormais quasi achevées.
Max songea alors au matériel supplémentaire que
la fusée lui avait apporté il y a juste six mois - sans que Andy soit à
bord comme l'avait
pourtant promis Victor ! Et puis il y avait encore tant de
déchets
inutilisés que Max trouva, très vite, comment s'en servir afin que la
vie sur Mars
devienne paradisiaque.
Il installa d'abord un parc d'attraction qui fit
rapidement fureur, la centrale solaire fournissant le courant
nécessaire.
Et puis, la glace des pôles continuant à fondre,
les rivières s'étaient changées en fleuves. Max utilisa l'eau pour
faire une immense piscine à vagues qui connut dès le premier jour
d'ouverture une affluence record.
Les véhicules à quatre roues motrices qui
transportaient des caméras et des bras mobiles furent transformés en
voitures tout-terrain et on organisa de fabuleux rallyes.
Mais la plus belle réalisation de Max fut la
télévision.
Une vieille station orbitale s'était échouée sur
Mars, par
le plus grand des hasards et Max s'en servit pour faire les studios.
Les
caméras ne manquaient pas, les martiens apprirent très vite à s'en
servir. Un laboratoire mobile - un peu endommagé par les années -
permit de créer une station météo et d'avoir ainsi un bulletin qui
était attendu dans les foyers avec impatience, car il pouvait pleuvoir
désormais sur la planète rouge. Quand aux concerts que donnait Max, ils
étaient retransmis dans chaque logis martien.
Et Max avait encore beaucoup d'idées en réserve
!
La mort dans l'âme, Victor finissait de vider les tiroirs de son
bureau afin de prendre une retraite anticipée, pour raisons
de santé.
Une petite fête aurait même lieu,
le lendemain, en présence des
plus hauts responsables scientifiques et politiques. Il y aurait un
discours, des petits fours et Victor ferait semblant d'être ému devant
tant de regrets exprimés à l'instant de son départ.
En réalité, les responsables de la Naso
faisaient tout ce qu'ils pouvaient pour étouffer le scandale.
Officiellement, la mission sur Mars s'était
tragiquement terminée et Max y avait laissé la vie ; c'est en tout cas
ce qu'espéraient vivement les responsables. Ainsi Max allait avoir
droit à son nom
gravé sur une plaque de bronze au titre de "héros mort au champ
d'honneur" et on ne parlerait plus jamais de lui !
Victor avait terminé ses cartons, un employé
viendrait les prendre plus tard.
Thomas apparut dans l'encadrement de la porte :
– Vous ne serez pas le seul à partir, Victor, on vient de me muter dans
une contrée peuplée de quelques centaines d'habitants et de millions de
moustiques. Moi aussi, je peux remercier Max.
– Par pitié, ne prononcez plus ce nom ! gronda Victor. J'aimerais
oublier jusqu'à son existence.
A cet instant, il y eut un bruit de bousculade
dans le couloir et des exclamations de surprise se firent entendre.
Intrigués, Victor et Thomas gagnèrent la salle
de conférence d'où provenaient des cris de stupeur. Quand ils
entrèrent, ils aperçurent d'abord une dizaine de secrétaires regroupées
devant un large téléviseur, puis ils virent le visage de Max en gros
plan sur l'écran.
– Max ! Mais où est-il ? s'exclama Victor.
– Chuuutt !! firent les secrétaires. Laissez-nous écouter !
– Vous êtes fatigué, vous aimeriez changer d'air, découvrir de nouveaux
horizons, disait Max dans le téléviseur.
Alors venez visiter Mars, une planète de rêve qui n'attend plus que
vous.
Le visage de Max disparut pour laisser place à
un ravissant village de vacances composé de villas troglodytes
entourées d'un jardin luxuriant, ainsi que d'un terrain de golf et d'un
magnifique parc d'attraction.
Victor en resta bouche bée, médusé par la
transformation de la planète rouge.
– Vous avez vu ? murmura-t-il à son adjoint. Il faut
détruire cette cassette immédiatement.
– Vous n'avez pas compris ? demanda Thomas.
– Compris quoi ? demanda Victor. Mais parlez donc, Thomas !
– Il a dû récupérer le matériel abandonné par les différentes missions
pour créer sa propre chaîne de télévision. Toutes ces images que vous
venez de voir, le monde entier les découvre en même temps que nous.
Thomas poussa une chaise sous les fesses de
Victor qui s'y laissa tomber et une secrétaire courut lui chercher un
verre
d'eau.
Quand Victor retrouva ses esprits, Max était en
train de donner
un numéro de téléphone pour réserver sa semaine de détente et il
invitait les terriens à contacter de ravissantes standardistes
martiennes.
– Non ! c'est impossible, hoqueta Victor.
– Mais si ! lâcha Thomas que rien désormais n'étonnait plus.
Comme si quelqu'un avait donné le signal du
départ, les secrétaires partirent en courant et on les entendit claquer
la porte de leur bureau, chacune leur tour.
– Où vont-elles ? demanda Victor.
Thomas eut un haussement d'épaules.
– Appeler Mars et choisir leurs dates de vacances.
– Elles sont folles ! s'exclama Victor.
Thomas acquiesça. Une publicité venait
d'apparaître sur l'écran, elle vantait une crème amincissante à base
d'argile rouge martienne.
Victor se leva si brusquement qu'il renversa la
chaise.
– Il faut le faire revenir sur Terre, c'est impératif !
Thomas se montra perplexe.
– Il ne sera jamais d'accord, vous le savez bien !
Victor vira au rouge cramoisi.
– Je n'ai pas l'intention de lui demander son avis.
Thomas prit un air intéressé.
– Vous avez un plan ?
– Bien sûr que j'en ai un, répondit Victor. Je vais me venger de toutes
les humiliations que j'ai subies à cause de ce misérable avorton. Je
vous jure qu'il ira croupir dans une cellule jusqu'à la fin de ses
jours.
Max consultait, avec bonheur, la liste des réservations. Les
centaines d'appels téléphoniques provenant de la Terre avaient bien
failli faire sauter le standard et le village de vacances n'offrait
déjà plus la moindre place disponible. Il fallait lancer immédiatement
la seconde tranche de logements.
Max donna un coup de téléphone pour prévenir ses
associés, Loppi, Chonp et Staf à qui il avait délégué une partie de ses
pouvoirs puis il se pencha sur un nouveau projet. Il restait encore
tant et tant de pièces détachées qu'il lui était venu l'idée de
fabriquer des petites soucoupes volantes. Elles serviraient à promener
les vacanciers dans l'espace et à leur faire découvrir Mars vue du
ciel. Ils apprécieraient certainement.
Victor et Thomas préparaient activement une
opération baptisée "Epervier". Le vaisseau, prévu à l'origine pour
emporter des
familles vers Mars, allait servir à la capture de Max. Victor avait
prévenu les astronautes : il ne
tolérerait aucun échec. S'ils ne parvenaient pas à ramener Max, il
était inutile de songer à revenir sur Terre !
Ainsi avertis, les astronautes ne pouvaient que
réussir leur mission.
Sous le prétexte de visiter la planète, ils
atterrirent sur Mars, s'emparèrent de Max par surprise, et reprirent
sans attendre la direction de la Terre.
Le retour fut rude pour Max, jeté sans
ménagement dans une sombre prison, et c'est là que Victor vint lui
rendre une visite.
– Victor, pourquoi avoir fait ça, s'étonna Max. C'est absurde !
– Vous croyez vraiment, Max ? A cause de vous, je suis devenu la risée
du monde scientifique et même du monde entier !
Max réalisa, soudain, qu'en décidant de vivre
sur Mars, il n'avait pas songé aux conséquences pour son entourage.
– Je veux réparer, Victor. Venez avec moi sur
Mars, je ferai de vous
mon conseiller.
– Pauvre cinglé ! Jamais vous ne sortirez de cette cellule, vous y
resterez jusqu'à la fin de vos jours.
La porte se referma et Max resta seul, assis sur
le maigre matelas qui lui servait de lit. Il chercha dans sa poche.
Avant de l'enfermer, le gardien lui
avait fait vider le contenu de ses poches et avait confisqué la
plupart des objets, sauf un stylo.
"Tu pourras toujours t'en servir pour compter
les
jours en faisant des traits sur les murs !" avait ricané le gardien.
Ce brave homme ne pouvait deviner qu'il
s'agissait, en réalité, d'un puissant ordinateur inventé par Loppi qui,
au contact du terrien,
apprenait très vite.
Max contacta ses amis martiens et leur donna sa
position précise. En retour, il eut un message extrêmement
réconfortant. Et voilà ! Maintenant, il n'y avait plus qu'à patienter.
Max jeta un coup d'oeil sur sa boite à messages
; elle débordait de mails envoyés par ses fans qui lui réclamaient des
autographes et la date de ses prochains concerts. Il allait avoir le
temps de leur répondre.
Victor et Thomas sont seuls, tous les deux, et font quelques pas
sur le
parking de la Naso)
– Comment vous sentez-vous, Victor, depuis que Max est enfermé dans sa
geôle ?
– Calme et détendu, mon cher Thomas, à un point que vous ne pouvez
imaginer, je pourrai même esquisser quelques pas de
danse. Et regardez-moi ce ciel si bleu, c'est une véritable merveille
que je ne
me lasserai pas de contempler !
Laissons Victor admirer le ciel pendant qu'il le peut encore ! Des
dizaines de soucoupes volantes, remplies de centaines de martiens de
très mauvaise humeur, viennent de quitter Mars et les voilà qui foncent
à vive allure vers la Terre.
Bientôt, elles rempliront de noir ce magnifique
ciel bleu.
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version revue et corrigée par l'auteur (juillet 2022)