Willy vint au monde par une magnifique journée de
printemps ; le ciel était d’un bleu
éclatant et le soleil se reposait,
paresseusement, en s’appuyant sur un gros nuage blanc. Comme
c’était la sainte
Fleur, ses parents choisirent de le prénommer William
Narcisse. Ils ne devaient
pas tarder à réaliser leur erreur.
Dès qu’il put
se déplacer à quatre pattes, Willy partit
à la découverte des plantes
vertes de la maison familiale, et des jardinières
débordantes de pensées et de
géraniums qui ornaient les fenêtres. Puis,
quelques années plus tard, planté sur ses deux
jambes, il
se lança à l’assaut des pommiers ou
escalada
les hautes branches des grands platanes. Et cela inquiétait
beaucoup ses
parents qui furent soulagés de le voir entrer à
l’école où il remplirait sa
tête de choses passionnantes.
Ils ne se trompaient pas, Willy fut
ravi. Il aima les tables en bois frottées à la
cire
d’abeille, le grand tableau vert accroché au mur,
la cour ombragée de
châtaigniers et l’institutrice, mademoiselle
Violette.
Très vite, le jeune
garçon apprit à lire, à
écrire et à compter,
mais la matière qu’il
préférait, entre toutes,
était la science naturelle. Les feuilles des arbres avaient
des formes si
différentes les unes des autres qu’il fallait
beaucoup de temps pour apprendre
à les reconnaître. Et il y avait aussi les
pétales des fleurs, leurs jolies
couleurs, leur doux parfum. Malgré tous ses efforts, Willy
n’obtint guère de
bonnes notes...sauf en science. Quand il montrait son carnet
à ses parents,
ceux-ci poussaient de grands
« Oh ! » et Willy
croyait qu’ils
étaient heureux. Alors, il l’était
aussi.
Vers l’âge de dix ans, il devint enfant de
choeur et s’occupa des fleurs qui ornaient l’autel
de la minuscule église. Il s’émerveilla
devant les lys immaculés, les glaïeuls
et les camélias qu’il déposait dans des
vases remplis d’eau fraîche et dont il s'occupait
avec amour.
Cela dura quelques
années, et puis un jour, il advint ce qui devait arriver.
Willy revint de
l’église le visage illuminé de bonheur.
A ses parents qui lui demandaient ce
qui le mettait de si bonne humeur il expliqua :
– Plus tard, quand je serai grand : je serai
jardinier.
– Un simple jardinier !
s’exclamèrent ses parents qui
rêvait de le voir devenir avocat ou, pourquoi pas,
architecte.
– Non, corrigea leur fils tout tremblant de bonheur, je serai
le jardinier de Dieu.
Effondrés, les parents
cherchèrent de l’aide. Ils se
précipitèrent chez le curé que cette
idée combla de joie et qui s'en alla sonner les
cloches pour apporter la bonne nouvelle
à tous ses paroissiens.
Les parents de Willy
consultèrent alors le médecin qui les rassura
aussitôt : « Pourquoi pas ?
Après tout, ce n’est pas
contagieux. »
Pourtant le père de
Willy refusait d’en prendre son parti et il décida
de le faire changer d’avis. Mais comment ?
Il crut bientôt avoir
trouvé la solution. Il emmena son fils jusqu’au
jardin et
tous les deux s’accroupirent devant une rose
mélancolique. Frêle bouton rose,
elle courbait la tête au bout de sa tige et les forces lui
manquaient pour déplier
ses minuscules feuilles vertes chiffonnées.
– Si tu parviens à la faire fleurir avant le
prochain lever
du soleil, dit le père à son fils, tu pourras
devenir jardinier.
En prononçant ce
serment, le père de Willy se montrait bien imprudent.
Durant la nuit, de sombres nuages
s’accumulèrent dans le ciel et un violent orage
éclata brusquement. Réveillé
dès la première foudre, Willy enfila son peignoir
et quitta la maison pour se précipiter au chevet de la rose.
Là, il s’assit
auprès d’elle, l’abritant sous un grand
parapluie et lui faisant, de son corps, un rempart contre le vent.
Jusqu’aux
premières lueurs de l’aube, il veilla sur elle,
luttant avec courage contre le
froid et le manque de sommeil.
Au matin, les parents,
affolés de ne pas trouver leur fils dans sa chambre,
descendirent
au jardin et découvrirent leur fils endormi sous le
parapluie noir. Quant à la
fleur fragile, elle s’était changée en
une rose éblouissante.
Willy est devenu jardinier dans son petit village et ses parents sont très fiers de lui. Les touristes viennent de toutes les provinces de France pour admirer les massifs d’hortensias rose et rouge, les guirlandes de glycines, les corbeilles de roses et les parterres de pivoines qu’il fait pousser. Mais c'est l'église qui demeure la plus belle à découvrir dans sa parure de fleurs blanches et cela n'a rien de surprenant puisque Willy a réalisé son rêve.
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