Esteban s'admirait dans le miroir et se trouvait très beau dans son nouveau pyjama en velours bleu avec une grosse tête de lion orangée qui lui recouvrait tout le ventre.
– Grrrrrraourrr ! Je suis le roi de la jungle ! s'exclama l'enfant en se redressant pour paraître plus grand.
Et c'est vrai qu'il avait fière allure.
Il y eut un bruit de pas dans le couloir et la maman du grand guerrier entra dans la chambre.
– Au lit, Esteban ! Il est l'heure de dormir.
Le garçonnet plaça ses jouets favoris dans son lit, les glissant sous la couette, la tête sur l'oreiller. Il y avait Batou le kangourou en peluche, Chico le clown en habit doré et Houpy le robot en plastique gris. Puis Esteban se coucha à son tour et la maman eut un sourire attendri en contemplant la ribambelle de copains.
– Je souhaite à tous un beau voyage au pays des rêves. Bonne nuit, Esteban.
La maman se pencha et l'enfant sentit un gros baiser chaud sur son front.
– Bonne nuit, maman.
La lumière s'éteignit, la porte se ferma et il n'y eut plus que le silence dans la chambre. Un silence qui ne dura pas longtemps.
– Psssttt... !
– Ouhou, Esteban ?
– Blizzz ! Krrrrrr ! Esteban ?
L'enfant rouvrit les yeux qu'il venait à peine de fermer et murmura d'une voix ensommeillée :
– Quand le soleil se couche, les enfants et leurs jouets font pareil. Ils se couchent et ils dorment. Vous avez compris, Batou ? Chico ? Houpy ? 
– Si on s'endort, quelque chose de très grave va se passer, répondit Batou le kangourou.
– Papilla, la souris, ne pourra plus nourrir ses huit enfants, ajouta Chico le clown.
– Blizzz ! Krrrr ! Papilla et ses petits mourront de faim et nous serons tous responsables de ce malheur, termina Houpy le robot.
Soudain, Esteban n'eut plus du tout envie de dormir.
– Comment une chose aussi terrible pourrait-elle arriver pendant notre sommeil ?
– Parce que ta maman s'est plaint au concierge qu'elle avait vu une souris dans la cuisine et le concierge est venu poser un piège devant l'armoire à provisions, expliqua Chico.
– Papilla profite de la nuit pour trouver de la nourriture pour ses petits, continua Batou.
– Blizzz ! Elle risque d'être prise au piège, dit Houpy, et ses petits n'auront plus de maman pour veiller sur eux.
Esteban comprit qu'il fallait agir sans perdre une seconde.
– Allons les amis, nous devons passer à l'action, décida le jeune garçon. Lumière, Chico !
Une petite lumière éclaira aussitôt le lit ; c'était la tête du clown qui s'allumait.
– Nous avons besoin de ton vaisseau spatial pour nous déplacer, Houpy.
Une belle locomotive jaillit soudain de dessous le lit d'Esteban ; elle était d'un joli vert prairie avec de grosses roues jaunes et une cheminée bordée de rouge.
– Elle est bizarre ta soucoupe, Houpy ! s'étonna Chico.
– Blizzz ! C'est une navette spatiale qui permet de voyager d'une pièce à une autre. Tous à bord !
Les quatre amis sautèrent en bas du lit. Esteban sentit qu'il rapetissait et quand il ne fut pas plus haut que ses amis, ils montèrent dans la locomotive.
La porte de la chambre s'ouvrit toute seule et voilà les quatre amis en train de traverser le couloir à toute vitesse. Et puis ce fut la salle à manger, et enfin ils arrivèrent à la cuisine où la locomotive s'arrêta devant l'armoire à provisions.
Par la porte entrebâillée, on apercevait un affreux piège à souris prêt à fonctionner avec un morceau de gruyère pour attirer la pauvre maman souris. 
– Comment faire pour désarmer ce piège ? s'inquiéta Chico qui avait très peur de déchirer son bel habit doré.
– Je crois que j'ai une idée ! s'exclama Batou et il lança sa longue queue de kangourou en peluche sur le piège. Celui-ci se referma aussitôt sur la peluche en claquant d'un coup sec.
D'un geste vif, Esteban décrocha le morceau de fromage et le donna à Chico.
– Cours le porter à Papilla. Elle sera heureuse de pouvoir donner à manger à ses huit enfants.
Pendant que Chico se précipitait chez la souris, Batou dégagea sa queue et rangea le piège dans la poche sur son ventre. Puis, au retour de Chico, ils reprirent la locomotive et regagnèrent la chambre d'Esteban. Et la porte se referma, sans bruit, derrière eux.

Esteban et ses trois copains étaient très heureux d'avoir réalisé une bonne action et ils bâillaient déjà à l'idée de retourner se nicher sous la couette encore chaude. La locomotive disparut sous le lit et c'est alors qu'un bruit étrange se fit entendre :
« Pok ! Pok ! Pok ! »
Ils se tournèrent de tous côtés, cherchant d'où cela pouvait bien venir quand Houpy le robot désigna la fenêtre :
– C'est la mésange qui a construit son nid dans l'arbre devant notre maison.
Piou – c'était son nom – donnait des coups de bec contre la vitre et agitait ses ailes grandes ouvertes.
– J'avoue que je ne comprends pas son langage, dit Houpy. Qu'en penses-tu, Esteban ?
– Moi non plus, Houpy. Il faut ouvrir la fenêtre et nous pourrons lui parler.
– Mais aucun d'entre nous ne sera assez grand pour atteindre la poignée, se désola Chico.
Esteban chercha une idée et il pensa aux pompiers. Aussitôt alertés, ils arrivèrent avec leur beau camion rouge et ils dressèrent la grande échelle contre le mur pour accéder à la fenêtre. C'est ainsi que Piou put entrer et il vint se poser sur le casque du chef des pompiers, qui ne protesta pas car il était très gentil.
– Que t'arrive-t-il, Piou ? s'inquiéta Esteban.
– Ce soir, il fait froid et mon nid n'est pas assez épais pour protéger mes oisillons contre le vent. J'ai besoin de votre aide ?
Esteban et ses copains cherchèrent comment faire mais ce n'était pas facile.
– J'aimerais lui offrir mon habit de clown, proposa Chico, mais il est trop fin.
– Je les mettrais bien dans ma poche, dit le kangourou, mais elle est trop petite.
– Je n'ai pas d'habit, ni de poche, soupira Houpy le robot. Comme c'est triste !
– Je crois que j'ai la solution, dit Esteban qui alla prendre son bonnet de laine rouge qui dépassait de la poche de son anorak et il le tendit à la mésange.
– Mon bonnet est très épais, Piou. Tes petits seront bien au chaud.
La mésange remercia Esteban de tout son coeur et, attrapant le bonnet par le pompon, elle s'envola pour rejoindre son nid.
La fenêtre fut vite refermée car il faisait vraiment très froid dehors et les pompiers repartirent garer leur beau camion rouge au milieu des autres jouets. Esteban reprit sa taille normale et se hâta de retourner dans son lit avec ses amis à ses côtés.
– J'éteins la lumière... Bonne nuit !
– Bonne nuit, chuchotèrent les copains.
Et tous les quatre s'endormirent rapidement.

Le lendemain matin, la porte de la chambre s'ouvrit doucement et la maman entra.
– Debout les courageux ! Le temps est doux aujourd'hui et nous en profiterons pour nous promener dans le parc. J'emmène Esteban et, si l'un de ses copains veut nous accompagner, il sera le bienvenu.
Tandis qu'Esteban se frottait les yeux en s'étirant, sa maman ouvrit les rideaux afin de laisser entrer le soleil dans la pièce. Il n'y avait pas un seul nuage dans le ciel d'un bleu éclatant, c'était vraiment une belle journée qui débutait.
Par la fenêtre, la maman aperçut Réglisse, le chat des voisins, en train de se rouler dans les feuilles mortes tombées sur la pelouse. Avec l'automne, l'arbre du jardin avait perdu presque tout son feuillage et il ne restait plus qu'une tache de couleur vive entre deux grosses branches.
« Comme c'est étrange, songea la maman. Je n'ai jamais vu un nid pareil à celui-là. »
Et elle interpella son jeune fils :
– Regarde, Esteban ! On dirait qu'un oiseau s'est emparé de ton bonnet de laine rouge pour installer ses petits dans l'arbre en face de notre maison. C'est amusant, tu ne trouves pas ?
N'obtenant pas de réponse, la maman se retourna mais elle ne vit que les trois copains assis sur le lit et sages comme seuls les jouets savent l'être. Esteban avait préféré se précipiter dans la cuisine où l'attendait un copieux petit-déjeuner. La maman décida de le rejoindre mais, alors qu'elle passait à côté du lit, une chose inhabituelle attira son attention.
– Qu'as-tu dans ta poche, Batou, on dirait... Mais c'est un piège à souris ! Comment est-ce possible, hier soir, il se trouvait devant l'armoire à provisions ?
Elle reposa le kangourou sur le lit en murmurant :
– Un nid d'oiseau, un piège à souris ! Décidément, il se passe des choses étranges dans cette maison.
Dès que la maman eut quitté la chambre, les trois copains bavardèrent entre eux :
– J'espère qu'Esteban va m'emmener en promenade avec lui, dit Batou.
– Moi, j'espère qu'il va nous rapporter des céréales,dit Chico.
Les bras de Houpy s'agitèrent :
– Blizzz ! Les jouets ne mangent pas de céréales.
– On pourra les donner à Piou pour ses oisillons, dit à son tour Batou.
Les yeux des trois copains se mirent à briller :
– Vivement qu'Esteban revienne ! On va s'amuser comme des fous dans le parc.

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