Crabbi avançait sur le fond de la mer en zigzaguant ; ce qui n'avait
rien d'inhabituel car les crabes se déplacent parfois de gauche à
droite afin de ne pas heurter un rocher ou un requin de grande taille.
Mais ce jour-là n'était pas un jour comme les autres car si Crabbi
marchait ainsi c'est parce qu'il était tombé amoureux. Oh, depuis peu
de temps ! En fait, ce grand événement venait juste de se produire.
Il était en train de contourner un bouquet
d'algues brunes quand elle lui était apparue, vêtue d'une ravissante
carapace rouge, se déplaçant à petits pas sur le sable blond. Quand
elle avait aperçu le jeune crabe venant à sa rencontre, ses jolis yeux
verts s'étaient posés sur lui et Crabbi avait été foudroyé. Un coup de
foudre, un vrai. Un nuage de bulles s'était formé autour de lui,
l'avait complètement enveloppé et quand, enfin, il s'était dissipé, le
joli crabe aux yeux verts n'était plus là.
Crabbi était resté là un long moment sans
bouger. Combien de minutes précisément ? Il l'ignorait ; les crabes
n'ont pas de montre accrochée à l'une de leurs pinces. Il avait fini
par retrouver ses esprits et c'est alors qu'il était parti en
zigzaguant, sans même savoir où il allait. Crabbi rêvait tout éveillé.
Il rêvait de jolis yeux verts qui plongeaient dans son regard, il
rêvait qu'il se tenait face à elle et qu'il lui disait : … Euh...
Crabbi chercha le mot, les mots ? et réalisa à
quel point il lui serait difficile de parler pour la toute première
fois à celle qui allait désormais remplir sa vie.
– Je lui dirai... Euh... Je lui dirai : Bonjour !
Oui, Crabbi en était certain, c'était le bon mot
: Bonjour !
Rêvant toujours, le jeune crabe, à la carapace
grise, arriva dans la plaine des Voiles. C'était un lieu extraordinaire
où de nombreux bateaux reposaient sur les fonds couverts de vase bleue.
Ces trois-mâts, ces frégates et ces bricks avaient appartenu à des
marins, parfois des corsaires, qui s'étaient affrontés au cours de
violents combats et avaient vu leurs bâtiments sombrer dans les flots.
Des dizaines de canons restés à leur bord et des milliers de pièces
d'or éparpillées rappelaient le souvenir de ces terribles abordages.
Au fil des ans, ces bateaux s'étaient
transformés en habitations et ils formaient un village où poulpes,
poissons et crabes aimaient à se rencontrer.
Puppa le poulpe se trouvait là lorsque Crabbi
arriva. Il agita trois de ses huit bras pour accueillir son jeune ami.
– Quelle chance nous avons, Crabbi ! De nouveaux
arrivants ont traversé les vastes espaces marins pour venir vivre avec
nous. Nous les attendons. Verte, la méduse, et ses sœurs les
installeront dans la frégate du pirate Jambe-de-Bois.
Verte (c'était son nom) s'approcha d'eux en
dansant lentement dans la mer et elle leur conta la légende de
Jambe-de-Bois.
– Ce pirate s'est révélé être le pire des
marins, fracassant chacun de ses bateaux sur les falaises mais il nous
a ainsi offert des maisons pour nous abriter moi et mes trois sœurs :
Jaune, Bleue et Mauve. Vite, je dois vous laisser pour aller préparer
la fête d'accueil des nouveaux venus !
Verte la méduse reprit son étrange pas de danse
et s'en alla.
– C'est une gentille méduse, dit Crabbi. Elle aime s'occuper des autres.
– Tu as raison. Elle m'a porté secours le jour
où j'ai emmêlé mes huit bras dans des hautes algues. Allons, Crabbi,
mettons un peu d'ordre sur l'épave de ce pirate. Avec tes pinces, coupe
les cordages qui traînent sur le pont et je les rangerai.
Crabbi utilisa ses longues pinces de crabe pour
trancher les cordes que Puppa entassa sous un rocher.
Pendant que tous
les deux s'affairaient, un petit personnage approcha. Cicérone était un
poisson pilote qui avait l'habitude d'escorter un requin blanc.
– Aurais-tu égaré ton grand requin ? s'étonna
Puppa en le voyant seul. Depuis que je te connais c'est la première
fois que son ombre ne plane pas au-dessus de toi.
– Dents-Longues est parti s'amuser avec ses
amis, répondit le poisson pilote. Et moi j'ai accepté de guider les
nouveaux arrivants jusqu'à notre village. Regardez mes amis, les voici !
Crabbi et Puppa découvrirent une file de crabes
qui avançaient dans leur direction et chacun arborait des couleurs
extraordinaires.
– Celui-ci est gris argent et celui-là vert
émeraude ! s'exclama Puppa, émerveillé de voir tant de crabes
différents car il ne connaissait que la carapace grise de son ami. Oh,
en voici un violet outremer !
Crabbi se montra tout autant enthousiasmé.
– Un marron à fines rayures et un orangé à
pois roses. Cela existe donc ? Et un crabe rouge... Comment ça un crabe
rouge ?
Crabbi la reconnut aussitôt. Comment aurait-il
pu l'oublier avec sa ravissante carapace et ces jolis yeux verts ? Le
jeune crabe disparut, une fois de plus, dans un nuage de bulles et
Puppa et Cicérone le taquinèrent.
– Elle vient de poser sur toi un regard plein
d'étoiles, dit Puppa et Cicérone ajouta : Son nom est Tilily. Pourquoi
ne vas-tu pas la saluer ?
– Oh, je n'oserai jamais ! s'exclama Crabbi qui
avoua : Je ne suis qu'un crabe parmi tant d'autres tandis qu'elle...
Elle est mille fois plus jolie qu'un lagon qui
dort sous le vent,
Mille fois plus belle que les moutons blancs qui
courent sur les vagues,
Mille fois plus ravissante qu'une plage ombrée
de cocotiers.
– Crabbi serait-il tombé amoureux ? s'amusa le
poisson pilote en agitant ses nageoires.
– Je crois que oui, dit Puppa et il désigna les crabes qui prenaient
place dans leur nouveau logis. Regarde, Crabbi ! Tilily est derrière un
hublot, je crois qu'elle te guette.
Crabbi hésita.
– Si je lui confiais que je rêve de devenir son
ami ? Oh, comment lui avouer ?
Puppa se mit à réfléchir. Avec un bras il se
frotta sous le menton et avec un autre il se gratta la tête. Enfin il
croisa ses six autres bras et proposa :
– Si tu lui offrais un cadeau de bienvenue ?
Surpris, Crabbi bredouilla qu'il ne saurait pas
lequel choisir ?
– Peut-être une étoile des mers ? proposa le
poisson pilote.
– Ou un collier de corail ? suggéra le poulpe.
Cela tintera joliment sur sa carapace.
– Bernard l'ermite dispose du plus grand choix
de coquillages, reprit Cicérone. Il tient boutique au lagon des
Bigorneaux.
– J'y cours ! dit Crabbi et il s'en alla.
Laissant le jeune crabe s'élancer en direction
du lagon, Puppa et Cicérone entamèrent une conversation et ils avaient
tant de choses à se raconter : leur vie passionnante au fond de
l'océan, les anémones qui leur offraient des jardins si colorés, les
dauphins qui semblaient éclater de rire à la moindre occasion... La
conversation risquait de s'éterniser.
Crabbi se déplaçait sur le fond sableux, un peu
embarrassé par ses huit pattes et ses deux lourdes pinces. Il songeait
au collier qu'il choisirait pour Tilily.
La bernique blanche ressortira
sur le rouge de sa carapace. Ou plutôt une porcelaine rose qui
tranchera dans l'eau bleutée.
Mais la forme des coquillages avait aussi
de l'importance.
Petits et ronds ? Ou longs comme les couteaux qui se
cachent dans le sable ? Non, les couteaux sont trop grands et les ronds
trop petits. Je préfère les encornés avec leurs fines rayures. Elle va
adorer !
Crabbi s'inquiéta : Pourvu qu'elle adore. Je
voudrais
tellement que nous soyons amis.
Crabbi parvint au lagon des Bigorneaux
où vivait Bernard l'ermite. «Le seul et unique spécialiste des
coquillages en tous genres» indiquait un panneau sur sa boutique.
Quand Crabbi lui révéla ce qu'il venait chercher Bernard l'ermite parut
si contrarié qu'il se cacha à l'intérieur de sa coquille.
– Je suis désolé, Crabbi, je ne sais comment te dire, mais puisqu'il
faut que je te l'avoue, eh bien... Je suis à court de coquillages.
Crabbi s'aplatit sur le sable pour tenter
d'apercevoir les yeux de Bernard au fond de la coquille :
– Je n'en demande qu'un tout petit peu, lui
expliqua-t-il. Je m'en contenterai.
Mais, d'une voix tremblante, Bernard lui raconta
:
– Monsieur Baleine désirait offrir un magnifique
cadeau d'anniversaire à madame Baleine pour leur cinq années de
mariage. Il a choisi un collier et il m'a fallu prendre tous les
coquillages amassés dans mes coffres. Il ne m'en reste plus un seul.
Crabbi se redressa.
– Plus un seul ? répéta-t-il dans un pauvre
murmure.
Soudain il se sentit si malheureux que son cœur
semblait prêt à se briser en mille morceaux.
Bernard se dégagea un peu de sa coquille et
Crabbi put voir deux grands yeux noirs qui le regardaient avec
gentillesse.
– Dans notre monde aquatique il y a tant de
jolies choses à offrir à la belle de ses rêves. Par exemple...
– Par exemple ?
Bernard sortit encore un peu plus de sa coquille.
– Si tu l'emmenais faire du deltaplane sur le
bord de mer ? Il te suffirait de louer deux paires d'ailes chez Louki
le poisson volant. Une fois les ailes accrochées dans le dos vous
pourrez découvrir la plage depuis le ciel et admirer les lézards qui
bronzent sur les rochers. Qu'en dis-tu ?
Crabbi ne parut pas convaincu.
– Et si elle avait le mal de l'air ? Cela arrive
parfois.
Bernard eut un sourire amusé.
– Je crois que c'est toi qui redoutes le mal de
l'air. Qu'en dis-tu ?
Vexé, Crabbi secoua ses pinces et cela fit un
léger clapotis dans l'eau.
– Je ne peux pas me tromper en choisissant le
cadeau de Tilily.
Bernard l'ermite trouva Crabbi difficile à
satisfaire. Il attrapa une poignée d'images au fond de sa coquille et
conta leur histoire.
– L'une de mes amies s'en allée faire un lointain voyage. Elle m'envoie
une carte postale à chaque nouvel océan traversé. Elle pourrait te
rapporter... (Bernard choisit une carte et la montra à Crabbi.) un
poisson rouge qui chante des chansons. Ou bien... (Bernard tendit une
autre carte.) un poisson clown qui fait des pirouettes. Ou alors
pourquoi pas... (Il présenta une dernière carte.) une charmante petite
tortue de mer.
– Elle est énoooorme ! s'écria le jeune crabe et
il mit ses pinces devant ses yeux pour ne plus la voir.
Surpris, Bernard l'ermite regarda la carte
postale et il découvrit une énorme tortue de deux mètres de long.
– Désolé, Crabbi ! Je crois que ce n'est pas la
bonne tortue.
C'est alors qu'une idée géniale vint à
l'esprit du Bernard l'ermite.
– Mais oui, bien sûr ! Comment n'y ai-je pas
pensé plus tôt ? Aucun cadeau ne pourrait être plus beau qu'une huître
pour Tilily.
Crabbi ne parut pas d'accord avec cette idée.
– Cela me paraît un peu lourd pour son cou.
Bernard l'ermite tapota l'épaule du jeune crabe.
– Voyons, Crabbi, réfléchis ! Que trouve-t-on de
joli et léger à l'intérieur d'une huître ? Tu as trente secondes pour
me donner la réponse.
– Euh... Je ne sais pas.
– Je te donne un indice : c'est rond comme la
pleine lune.
– Euh... Un poisson porc-épic rempli d'air comme
un ballon et il est couvert de piquants partout, partout, partout. J'ai
bon ?
– Sûrement pas, Crabbi. Un autre indice ? C'est
noir et brillant à la fois. Encore quinze secondes !
– Euh... Une otarie toute petite, petite, petite.
– Voyons, Crabbi, une otarie, même toute petite,
ne peut pas se glisser à l'intérieur d'une huître. Je ne jouerai plus
aux devinettes avec toi. Il s'agit d'une perle noire et il n'en existe
qu'une seule dans notre océan. L'huître qui la renferme habite la
vallée des Anémones. Tu te rends chez elle, tu la salues poliment et tu
lui demandes de te donner cette perle. Tu as bien compris ?
– Oui, dit Crabbi qui hésita : Et si elle refuse
?
Bernard l'ermite s'énerva. Il avait perdu assez de temps avec ce crabe
et il devait repartir à la pêche aux coquillages pour remplir ses
coffres désespérément vides.
– Si elle refuse tu lui racontes une histoire
drôle et quand elle éclatera de rire, tu en profiteras pour lui dérober
la perle. Et voilà !
Crabbi s'imagina en train de faire rire l'huître
aux éclats, puis de s'emparer de la perle. Et hop ! il posséderait
enfin le cadeau pour Tilily.
– Bravo pour ton idée géniale, Bernard. Je te
remercie de... Bernard ? Bernard ? Mais où est-il passé ?
Crabbi chercha autour de lui mais Bernard avait
préféré partir à toute vitesse ; il avait tant à faire. Alors le jeune
crabe quitta le lagon, suivit le sentier bordé d'algues bleues et
il atteignit la vallée des Anémones.
A peine arrivé, Crabbi aperçut une huître
accrochée sur un gros rocher. Il s'approcha et l'interpella :
– Je vous salue, madame l'huître, et je vous
demande, bien poliment, de m'offrir votre perle noire.
L'huître ouvrit un œil, puis l'autre. Elle était
d'humeur taquine ce jour-là et elle eut envie de se moquer du jeune
crabe.
– Cette perle-là ? demanda-t-elle en ouvrant une
large bouche pour montrer une perle noire au fond de sa gorge.
– Oh oui, dit Crabbi. Je vous remercie de me la
donner, c'est très gentil de votre part.
Il fit deux pas vers l'huître mais celle-ci
déclara soudain :
– Jamais tu ne l'auras !
Elle se referma si vite qu'elle souleva un nuage
de sable qui enveloppa Crabbi. Le jeune crabe n'y voyait plus rien. Il
se mit à tousser, fit un tour sur lui-même, puis un autre dans l'autre
sens sans plus savoir où il posait ses pattes. Enfin le sable retomba
et Crabbi s'aperçut que l'huître était toujours accrochée à la même
place sur son rocher.
Cela ne va pas être aussi facile que je le
croyais, songea-t-il. Voyons ! Je vais lui raconter une
histoire
drôle, elle ne pourra s'empêcher de rire et je me saisirai de cette
perle.
Crabbi chercha dans sa mémoire parmi toutes les
histoires qu'il connaissait et il désirait choisir la meilleure.
C'est une anémone rouge qui aperçoit une
anémone verte et lui demande... Non, elle n'est pas assez amusante. Je
vais en essayer une autre... Peut-être celle du dauphin qui s'appelait
Marcel ? Oh non. Beaucoup trop longue. Et le requin qui a perdu sa dent
et qui cherche la petite souris ?
Après beaucoup d'efforts, Crabbi trouva enfin ce
qui conviendrait le mieux.
– Madame l'huître connaissez-vous l'histoire du
poisson rouge qui se cogne contre un crabe. Le crabe lui dit : Pourquoi
m'as-tu bousculé ? Et le poisson rouge lui répond : Je ne vois pas où
je vais, j'ai de l'eau dans les yeux.
Crabbi éclata de rire. C'était, de loin, son histoire préférée et il
adorait la répéter encore et encore pour le seul plaisir de se sentir
mourir de rire. Enfin il retrouva son calme et jeta un coup d'oeil en
direction de l'huître. Elle n'avait pas bougé de son rocher.
Le jeune crabe sentit la tristesse l'envahir. Il
n'y arriverait jamais !
– Je vais m'en aller, madame l'huître, puisque
je n'ai pas réussi à prendre la perle. Je crois que je ne suis pas un
crabe très malin. J'ai échoué chaque fois que j'espérais trouver un
cadeau pour Tilily. (L'huître se mit à bâiller.) D'abord il y a eu les
coquillages. J'avais choisi leur forme et même leur couleur, mais,
hélas, ils ont servi à réaliser un collier pour madame la baleine.
Quelle chance elle a ! Quant au deltaplane, oui c'est vrai j'ai le
vertige et je n'y peux rien. (L'huître bâilla plus longuement.) Hé,
vous pourriez m'écouter ? Après tout je vais perdre le crabe de ma vie.
Elle est si craquante avec sa carapace rouge et ses charmants yeux
verts. On aurait pu fonder une famille, elle et moi. On aurait habité
dans une vieux bateau et... (L'huître ouvrit grand la bouche et bâilla
sans pouvoir s'arrêter.)
Crabbi se précipita et, d'un coup de pince, il
s'empara de la perle et prit la fuite.
Tout en se sauvant de toute la vitesse de ses
pattes, Crabbi pensa à l'huître qui allait sans doute entrer dans une
terrible colère. Elle deviendrait toute rouge, ce qui n'est pas courant
pour une huître, et elle pousserait un cri si puissant qu'il
franchirait la barrière de corail pour atteindre les îles Sous-le-vent.
Les singes en tomberaient de leurs cocotiers.
Mais Crabbi n'entendit aucun cri. Il s'arrêta
donc de courir et se retourna. De loin – car il avait couru très vite –
il aperçut l'huître, toujours sur son rocher. Elle s'était refermée et
dormait d'un profond sommeil.
Crabbi eut honte de son geste et il pensa même –
oh, juste une ou deux secondes, pas davantage – à faire demi-tour pour
aller s'excuser auprès d'elle. Mais il revit Tilily et sa carapace
rouge, ses yeux verts et il comprit qu'il ne pourrait plus vivre sans
elle désormais.
Crabbi poursuivit sa longue route et
finit par
retrouver Cicérone le poisson pilote et Puppa le poulpe qui guettaient
son retour. Ceux-ci n'en crurent pas leurs yeux quand ils aperçurent le
jeune crabe rapportant la perle noire.
– Tu as réussi, Crabbi ! s'exclama Cicérone.
– Tu as ramené le plus beau des cadeaux !
s'écria Puppa.
Mais le jeune crabe n'écoutait pas, il se
tournait de tous côtés.
– Je ne l'aperçois pas. Où est-elle, pourquoi
a-t-elle disparu ?
– Elle n'a pas quitté le bateau ! s'écrièrent en
choeur le poulpe et le poisson pilote. Elle guettait ton retour. La
voilà !
Crabbi se hâta vers Tilily et, quand tous deux
furent face à face, le jeune crabe lui offrit la perle noire. Alors,
une chose incroyable se produisit : toutes les cloches en bronze des
vieux navires se mirent à sonner à la volée révélant, qu'après tant
d'années passées au fond de l'eau, elles s'étaient réveillées.
Cela émerveilla les crabes, les poissons et une
baleine qui passaient là par hasard.
– Il faut préparer une autre frégate, suggéra
Cicérone. Bientôt, il y aura une nouvelle famille de crabes parmi nous.
– J'en suis heureux pour notre jeune ami, assura
Puppa.
Crabbi et Tilily réunirent leurs amis et organisèrent une
belle fête. Tilily portait la perle sur sa carapace rouge et Crabbi
arborait une anguille en guise de cravate. Des étoiles de mer se
lièrent l'une à l'autre pour jouer les guirlandes et, un peu partout,
fleurirent des bouquets d'anémones de toutes les couleurs.
L'huître refusa de répondre à l'invitation que
lui fit parvenir Crabbi ; on dit qu'elle prépare une nouvelle perle et
qu'elle ne supporte plus d'entendre quelqu'un lui raconter une histoire
drôle.
Quant à Crabbi et Tilily, dans un avenir proche,
ils auront sans doute beaucoup d'enfants. Vous penserez peut-être à
eux, durant l'été, quand vous irez marcher, pieds nus, dans les vagues.
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